“LA-BAS”

Quand ils sont arrivés Là-bas L’horizon n’était que la canne Et le vent fouettait leurs torses nus.

Quand ils sont arrivés Là-bas La canne leur obstruait le soleil Se dressait entre eux et la liberté.

Quand ils sont arrivés Là-bas La canne leur barbelait leur regard Colère et soif sillonnaient leurs corps.

Ils n’avaient sur les lèvres Que le chant du silence Qu’un chant de solitude Que leurs chants sans écho

Quand ils sont revenus De Là-bas Par vagues noires successives Leur sang teintait la canne.

Quand ils sont revenus De Là-bas Porter les tiges de canne Comme on porte une croix.

Quand ils sont revenus De Là-bas Déjà les tiges de la canne Était de sueur et de sang.

Ils n’avaient sur les lèvres Que le chant du silence Qu’un chant de solitude Que leurs chants sans écho.

Jacques Roche

“L'enfant de la canne”

Je suis un enfant de la canne Un enfant de l'enfer Je n'appartiens à aucune terre Mes mains murmurent dans le vacarme.

Je suis un enfant de la canne Un enfant de la frontière Je n'appartiens à aucun pays Mes mains hurlent dans le silence.

Je suis un enfant de la canne Un enfant de la honte Je n'appartiens à aucun peuple Mes mains dénoncent dans le chaos.

Je suis un enfant de la canne Un enfant du désespoir Je n'appartiens à aucune nation Mes mains espèrent dans l'oubli.

Je suis un enfant de la canne Un enfant de la révolte Je n'appartiens à aucune race Mes mains pleurent dans l'histoire.

Je n'ai de cour que le champs Je n'ai de récréation que le champs Je n'ai d'horizon que le champs Mes mains cherchent une patrie Mes mains quêtent une enfance Mes mains quémandent une urgence Et mon regard erre sur l'île…

Jacques Roche

“JAMAIS ESCLAVE !!! ”

Nous étions des guerriers Nous étions des fils et des filles de rois Ils sont venus chez nous de l’autre côté de la mer Ils ont dit que nous étions des sauvages. Ils nous ont achetés aux nôtres, à nos ennemis, Ils nous ont enlevé dans nos champs, chassés comme des animaux dans nos forets Et emmenés, enchainés dans les entrailles de leurs navires. Nous sommes morts par milliers, par centaines. Nous ne savions pas quel sort nous attendait la bas

Nous étions des guerriers fiers et libres, Nous étions des fils et des filles de rois Ils nous ont vendus comme des bêtes Ils nous ont traités pires que des animaux Nous avons courbé le dos, mais nous avions gardé l’espoir

Ils ont essayé, oh oui de nous briser !! De nous réduire à être ce qu’ils voulaient Juste des mains, juste des corps, juste des outils Mais ils ont oubliés Nous étions des guerriers fiers et libres, Nous étions des fils et des filles de rois Jamais nous nous n’avons été ce qu’ils croyaient Jamais esclaves Dans nos cœurs resonnaient le son des tam-tam de nos savanes Les chants de notre pays

Nous nous sommes courbés Mais jamais nous n’avons été brisé Dans nos cœurs et dans nos âmes brulait la flamme de la révolte Jamais resignés , jamais acceptés le sort auquel ils nous destinait. Esclave, jamais Nous sommes des guerriers Des fils et des filles de rois Jamais esclave

Comme les roseaux nous nous sommes courbés Mais nous nous relèverons et rien ne pourra arrêter le feu qui nous dévore La liberté, au prix du sang, de la nôtre, de la leur. Toute leur puissance, toutes leurs armes, tous leurs soldats Ne pourront retenir le courroux, la force d’un peuple trop longtemps opprimé Nous n’oublions pas d’où nous venons, qui nous sommes Des fils et des filles de rois Des guerriers Jamais des esclaves Mais eux, ils l’ont oublié

Islande Élysée / Janvier 2022